“Des vents porteurs”, de Thierry Libaert ou Comment revoir le fond et la forme de l’écologie !

Stephane Kersulec
4 min readMar 8, 2022

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Quand on m’a offert le livre lauréat du « prix du livre environnement 2021 » de la fondation Véolia , j’ai été (très) méfiant.

En ces temps de greenwashing généralisé, voilà une belle opportunité de faire pousser des idées-solutions qui n’en sont pas.

Mais à la lecture de « Des vents porteurs » de Thierry Libaert, les soupçons sont levés !

Au final, une belle découverte que je vous recommande ; et qui m’a personnellement parlé en tant que professionnel (et bénévole) de la sensibilisation sur le changement climatique avec la Fresque du Climat.

En voici quelques raisons :

- Il pose bien le sujet dans une intro aussi brève que tranchante avec une histoire d’incendie façon Don’t look up, confinant à l’absurde.

- Il démystifie/déchiffre tous ces sondages qui font miroiter qu’une majorité de français se préoccupent en premier lieu de l’environnement, que les jeunes se préoccupent et sont ultra engagés contre le changement climatique. Attention à la surmédiatisation des minorités visibles qu’on a envie de voir. En particulier parce qu’ « un sondage résulte d’une commande » et que « la réponse à un sondage est un moyen de valorisation de soi »

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Avec ce point d’attention sur notre schizophrénie entre les intentions, quasi toujours louables, et leurs réalisations, entre 2 matraquages publicitaires, entre beaucoup d’autres choses (il prend le temps aussi de relativiser la critique publicitaire), poussant à la consommation.

- Il pose (rappelle) la difficulté de la sensibilisation sur les enjeux environnementaux : c’est flou, c’est loin, moi-je-veux-bien-mais-les-autres-ne-feront-rien, etc.

- Il distille quelques fondamentaux de la communication : un objectif cognitif (l’information à transmettre), un objectif acceptatif (la cible), un objectif affectif (susciter l’émotion), un objectif conatif (pour viser une modification de comportement).

- Il dresse un panorama fort long et instructif de toutes les erreurs qu’on retrouve dans la communication autour des enjeux environnementaux, et il y en a beaucoup. Mais en gros, le discours écolo ne fait pas envie.

Au-delà de la critique, cet expert en communication nous livre ses propositions :

- « Donner des messages avec une perspective d’espoir » et « accompagner le message d’indications concrètes permettant au destinataire de le décoder immédiatement dans une vidée opérationnelle »

Faire attention à cibler les messages, se baser sur l’émotion, « conjuguer perception des conséquences et perception de son propre rôle », « rendre proche le changement climatique ».

- Se garder des mises en garde quant à des franchissement de seuils (de type on a 2/5/10/20 ans pour se sauver)

- Enfin, « l’écologie doit donner envie et, pour ce faire, son discours doit réintroduire de la vie. Le capitalisme s’est construit sur l’idée de liberté, le socialisme sur celle d’égalité. Et l’écologie… contre le CO2 ! »

Evidemment l’écologie est née bien longtemps avant les luttes contre le changement climatique, mais il me semble clair que le récit porté de l’écologie est souvent un imaginaire de lutte (contre le DDT, contre les projets d’artificialisation, contre le capitalisme, contre la croissance), et plus minoritairement un imaginaire de société alternative.

J’aime la fin du livre, très orientée sur la question du « WHY » (cf TED Talk de Simon Sinek) qui invite à revoir quel objectif se cache derrière l’écologie, à savoir la construction d’un « nouveau récit qui devra dépasser l’angle environnemental », récit centré sur la question du sens et de notre conception du bonheur.

Des “vents porteurs”… pour essaimer vers le bon cap !
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Avec des débuts de piste autour de la force de nos relations sociales, « premier déterminant du bonheur ».

Et de rappeler « Nous connaissons les ressorts de l’efficacité d’un récit : la plausibilité, la force émotionnelle, le lien avec nos environnement, et surtout la conformité à notre culture, nos mythes et légendes, nos normes »

Il adjoint le fond et la forme en finissant par de l’espoir en forme de proposition

« Ce dont il est question ici, c’est d’une réorientation de l’objectif ». « Il n’y a pas de vent porteur pour celui qui ne sait pas où il va ».

Une invitation à définir collectivement un cap, loin des fondements mercantiles et matérialistes de nos sociétés-économies occidentales.

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